De ses six frères et sœurs, Michel Eyquem est le premier à abandonner le patronyme familial. Né en 1533 au château de Montaigne, dans le Périgord, il en prendra le nom. Son père, riche négociant bordelais récemment anobli, est un partisan enthousiaste des idées nouvelles de la Renaissance et consacre l'éducation de son fils aux méthodes pédagogiques des humanistes. Jusqu'à l'âge de six ans, le jeune Eyquem est confié à l'allemand Horstanus dont il hérite une parfaite maîtrise du latin. De 1539 à 1546, le jeune noble poursuit ses études au collège de Guyenne, à Bordeaux. Après la philosophie, Montaigne fait son droit à Toulouse jusqu'en 1549. Il est nommé conseiller à la cour des aides de Périgueux en 1554, alors même que son père est élu maire de Bordeaux. Après la suppression de ladite cour, en 1557, il est transféré au Parlement de Bordeaux où il fait la connaissance de celui qui deviendra son plus rand ami, Étienne de La Boétie, qui meurt cependant dès 1563, laissant à son complice un sentiment de terrible injustice et d'infinie solitude. Converti au catholicisme pour intégrer le Parlement de Paris en 1559, il le quitte deux ans après. En 1565, le diplomate épouse la fille d'un riche parlementaire, Françoise de la Chassaigne, qui lui donne six enfants dont seule la cadette Léonor survit. Respectant la promesse faite à son père, mort en 1568, Montaigne publie le traité du catalan Raimond Sebond intitulé Théologie naturelle (1569). Atteint d'une forme de calcul appelé en son temps, « la maladie de la pierre », ou « la gravelle », il prend conscience de sa mort prochaine et se retire sur ses terres pour se consacrer à la publication des œuvres de La Boétie. Ne parvenant à mener ce projet à terme, il donne naissance à une tout autre œuvre, expérimentale et mal définie, mais qui s'imposera comme unique et magistrale : les Essais. Assemblage de ses méditations, des diverses expériences qui ont omposé sa personnalité si complexe, le recueil sera sans cesse remanié. Si l'érudit humaniste se consacre à l'étude, aux lectures dévorantes d'historiens, moralistes et philosophes auprès desquels Sénèque et Plutarque tiennent une place privilégiée, le Chevalier de Saint Michel interrompt sa retraite pour honorer son titre de gentilhomme ordinaire de la cour du roi Henri de Navarre. En 1574, durant la quatrième guerre de religion, Montaigne accepte de rejoindre l'armée royale du Duc de Montpensier, ayant à traiter avec le Parlement de Bordeaux pour contrer une offensive de la Réforme. À son retour en 1580, il publie la première édition des Essais alors composés de deux livres. Luttant contre la maladie, il part se soigner en Europe où il tient un Journal de voyage qui ne sera publié qu'au XVIIIe siècle (1774). Élu à la mairie de Bordeaux, il est obligé de rentrer après un an. Mais, en dépit des grandes difficultés qu'il traverse, Montaigne honore si bien son mandat qu'il est réélu en 1583. Une épidémie de peste le chasse pourtant en 1586, ses terres alors infestées. Le bordelais se réfugie à Paris où il rencontre Melle Le Jars de Gourney qu'il désigne comme sa « fille d'alliance ». En 1588, il publie une nouvelle version des Essais alors augmentés d'un troisième livre.
Jusqu'à sa mort, en septembre 1592, Montaigne se sera consacré à l'ouvrage si particulier et si hasardeusement entrepris que sont les Essais. Récupérant ses dernières notes grâce à l'aide de Mme de Montaigne et de l'ami du couple Pierre de Brach, Melle de Gourney publie en 1595 l'ultime version qui fera autorité sur les siècles - et les esprits - à venir.